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LA RIVIERE GLACEE
10 juin 2007

Le lendemain, le petit déjeuner prend des allures

Le lendemain, le petit déjeuner prend des allures de tournoi. Entre les deux chats qui sautent partout en miaulant, et le chien qui s’agite autour de la table en battant de la queue, et en leur fourrant sa grosse truffe humide sur les genoux, tremper ses tartines dans son bol s’avère un exploit. A la fin, Jeannot hurle :

-  «  Marie et Béryl, milles sabords, Ils ont mangé, ces bestiaux ? Alors qu’on me foute tout ça dehors ! DEHORS ! Non de non ! »

        Une fois le calme revenu, Borg annonce sa décision de partir quelques jours à Paris. Il doit rencontrer son père pour affaires, dit-il. Il demande à Béryl si elle veut venir avec lui ou rester avec leurs amis. Béryl dit qu’elle aimerait bien venir pour voir sa famille, mais qu’il y a les deux chats…

-  «  Je te les garde, tes chats ! Dit Marie. Cette maison est devenue une arche de Noé, alors deux de plus, ça ne se voit pas. »

-  «  Et toi, tonton tu es d’accord ? »

-  «  Mais oui ! Je ne fais pas le poids contre deux femmes comme vous ! Essaies de trouver des canaris à Paris, ça pourrait devenir intéressant, avec les chats ! »

        Mr. Campoin ne peut pas le conduire à Evreux : Il a promis de déblayer les routes du village. Il lui dit de voir Cormessard qui doit justement y aller.

C’est ainsi que Borg fait enfin la connaissance du paysan à qui il a squatté le hangar. Il est un peu gêné au début, mais l’autre le met à l’aise : Tout est rentré dans l’ordre. Les vaches ont été réparties dans quelques fermes, et il a pris les chevaux chez lui. Borg lui demande si les bêtes ont bien cicatrisé. Cormessard sourit en répondant qu’elles vont très bien, et que c’est la première fois de leur vie qu’elles voient un docteur, et que si un jour une de ses bêtes est malade, il saura qui appeler. Borg proteste en riant que décidément non, il préfère soigner les gens. L’autre enchaîne pour conclure :

-  «  C’est quand même un beau geste ! Surtout pour un Parisien. »

        Borg revient trois heures plus tard, avec un 4x4, dont le coffre est rempli à ras bord de provisions de toute sorte. De quoi tenir un siège d’un mois, s’exclame Marie. Borg lui répond qu’il vaut mieux prévoir, au cas où il recommencerait à pleuvoir.

Pendant ce temps, Jeannot et Monsieur Campoin, prénommé Eugène ont entrepris de déblayer la route qui conduit à la nationale. Ils discutent de l’inondation, et Eugène dit que c’est une catastrophe pour les paysans. Tous les champs ensemencés sont ravagés. Il faudra tout recommencer. Si on ajoute à cela la sécheresse de l’été, c’est la pire  année qu’il ait jamais vu.

Borg vient le saluer, et lui demande s’il peut garder son cheval jusqu’à ce qu’il aie une nouvelle habitation, vu que la sienne est sous l’eau. Pas de problème, répond Eugène, aussi longtemps qu’il faudra, et que c’est la moindre des choses après ce qu’il a fait pour les bêtes. Il ajoute qu’il accepte qu’on lui paie la nourriture du cheval, mais qu’il ne veut pas un sou de plus. L’étonnement de Borg est sans borne.

        Avec les provisions que Borg a rapportées, les filles ont composé un menu somptueux, auquel ils ont fait honneur. Les animaux aussi y ont eu droit, et ils dorment, repus, dans un calme étonnant.

-  «  Ils s’habituent à leur nouvelle maison. » Dit Marie.

-  «  Ce qui est étrange, c’est qu’ils fassent si bon ménage ! » s’étonne Borg

-  «  Les labradors sont des animaux très conviviaux. »

Béryl demande à Borg où ils logeront à Paris, et  il  répond qu’ils iront à l’hôtel dans un premier temps, car il ne sait pas exactement combien de temps durera ce séjour.

-  «  Maintenant, je vais appeler mon père pour le prévenir. »

Il l’appelle sur son portable pour être sûr de ne pas tomber sur sa mère. Au bout d’un court instant pendant lequel Borg a le temps préparer les premiers mots, son père décroche.

-  «  Bonjour Père, c’est Borg. Je viens demain avec Béryl à Paris. Je souhaite avoir un entretien avec toi, si tu es disponible, bien sûr. »

-  «  Je serai toujours disponible pour mon fils. Si tu le veux, nous pouvons déjeuner ensemble, et je m’arrangerai pour être libre l’après midi. Jusqu’à seize heures. Ensuite, je dois impérativement prendre l’avion pour Boston. Cela te convient-il ? »

-  «  C’est… plus que je n’osais l’espérer. »

Il entend un rire, et son père conclue :

-  «  Alors à demain. Douze heures, chez Gaston. Si je me souviens bien, tu es féru de fruits de mer ? »

-  «  En effet. »

-  «  Est-ce que Béryl t’accompagne ? »

-  «  Non… Pas cette fois-ci. »

-  «  Alors on fait comme ça. A demain, Borg. »

Borg raccroche en respirant un grand coup. Il ne reconnaît plus son père. Cette transformation est époustouflante, et il compte bien avoir demain la réponse à ce mystère. Il dit à Béryl :

-  «  Tu devrais prévenir tes parents que tu passeras la journée avec eux. Je t’y conduirai vers onze heures et te rejoindrai vers dix-sept heures. »

Béryl téléphone à son tour, et à l’autre bout de la ligne, c’est la joie la plus totale exprimée à grand renfort d’exclamations émues.

La soirée continue sur un ton assez nostalgique. Ils n’ont pas vraiment envie de se quitter. Le lien qui les relie va au-delà de l’amitié. C’est quelque chose de si fort, que cette rupture leur fait presque mal physiquement. Marie a « le dos en marmelade », et Borg un début de migraine. Quant à Jeannot, il est silencieux, cela veut tout dire.

Seule Béryl est sereine, car dans sa grande sagesse, elle sait que la distance ne veut rien dire, qu’une seule force réunit ceux qu’elle aime, et que cette force rayonne en elle comme une grande lumière.

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