Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LA RIVIERE GLACEE
10 juin 2007

Il reprend doucement le chemin de la maison, en

Il reprend doucement le chemin de la maison, en pensant à cet hiver qui approche, aux jours sombres qui l’attendent dans cet immense appartement vide qui ne lui plait pas. Il se demande ce qui le retient à Paris, sinon son manque de motivation pour recommencer ailleurs. A quoi bon, s’il est encore seul ? Puis il prend soudain conscience de ses pensées moroses. « Borg, se dit-il, tu ne recommences pas à descendre vers des régions sombres, remontes vers la lumière et fais-lui confiance. »

Quand il entre chez lui, il voit Jeannot toujours en train de lire. Alors il va s’allonger dans sa chambre pour le laisser terminer tranquille, et s’endort. Et il rêve. Il est près de deux femmes, une qu’il ne connaît pas, et l’autre est l’écrivain. Elles ont toutes les deux des yeux immenses, et à la place des pupilles, il y a des fleurs de lumières d’un rose extrêmement lumineux. Toutes deux lui tendent la main et lui disent :

-  «  Viens, Borg, viens avec nous. »

Devant lui s’étend un vide de clarté blanche, à l’infini. Il a peur, il recule, mais quand il regarde derrière lui, il ne voit que la rivière glacée. Il est là, entre deux mondes qui l’effraient, quand il se réveille. Jeannot le secoue :

-  «  EY ! Réveilles-toi mon petit gars, sinon tu ne vas plus dormir cette nuit, et il est l’heure de manger, la bouffe est prête. »

Ils ne disent pas un mot pendant qu’ils mangent, chacun perdu dans ses pensées. Une fois le repas terminé, ils s’installent dans le salon et Borg demande à Jeannot ce qu’il a pensé du livre.

-  «  C’est dingue, cette femme, elle connaît tout de nous, mais çà ne m’étonne qu’à moitié, vu les yeux qu’elle a. »

-  «  Oui, j’ai remarqué qu’elle avait de très beaux yeux verts, mais quel rapport avec l’histoire. »

-  «  Elle a le même regard étrange que ma copine Line, des yeux qui voient à travers les gens et les choses. Et…ton espèce de fleur rose, c’est vrai ou quoi ? »

-  «  Oui, mais je ne tiens pas à en parler, parce que je ne comprends pas encore. »

-  « Si je te demande ça, c’est parce que ma copine Line, elle la connaît ta fleur. »

-  «  Ah bon ? Et elle t’a dit ce que c’était ? »

-  «  Non mon gars, je ne lui ai pas demandé, parce que tu vois… Eh bien, je suis sûr que tu vas rigoler parce que les toubibs, ils sont un peu… coincés là dessus, mais…. Line, elle a le don de savoir des choses, et aussi elle guérit des gens, comme ça. Je lui en ai parlé un jour, j’étais curieux, tu comprends. Elle s’est contentée de rire en me disant qu’elle n’y était pour rien, que c’était une fleur de lumière qui faisait le boulot, et que c’était tout. Puisqu’elle n’avait pas envie d’en dire plus, je n’ai pas insisté. »

-  «  On va téléphoner à cet écrivain, comment s’appelle-t-elle déjà ? Ah oui, Marie Valente. »

Borg entend la sonnerie qui retentit à l’autre bout de l’univers lui semble-t-il. Son cœur bat très fort, il a la bouche sèche, il ne sait pas ce qu’il va dire. Il entend soudain une voix de femme qui dit :

-  « Allô »

-  « Madame Valente ? »

-       « Oui Borg, je vous écoute. »

-       «  Vous saviez que c’était moi, d’ailleurs je me suis rendu compte en lisant votre livre que vous savez beaucoup de choses sur moi, et j’aimerai vous rencontrer pour en parler. »

-       «  Je suis d’accord, mais avant tout, je voudrais savoir si l’histoire que j’ai écrite est vraie. Vous est-il vraiment arrivé toutes ces choses. Excusez-moi, mais je ne peux pas attendre plus longtemps pour le savoir. »

-   «  Tout y est absolument vrai dans les moindres détails. »

Il entend Jeannot derrière lui qui proteste énergiquement.

-   «  Passes-la moi, j’ai des choses à lui dire »

Borg lui tend le combiné, et Jeannot hurle:

-   «  Bonsoir Madame, je me permets de vous dire qu’en ce qui me concerne, vous vous êtes trompée plusieurs fois. D’abord, ça n’était pas Satie que j’écoutais quand la mère de Borg a débarqué, mais Wagner. Secondo, je n’ai pas commandé de bouteille de champagne sur le bateau mouche, vu que ça coûte la peau des fesses, mais des coupes. Tertio, je n’ai pas acheté un costume en satin, mais en soie. »

Il entend une cascade de rire et Marie qui lui répond :

-   «  Cela prouve simplement que je suis plus proche de Borg que de vous. »

Très vexé, Jeannot redonne le combiné à Borg pour « qu’il se débrouille avec cette bonne femme »

Borg rétablit le dialogue pour convenir d’une entrevue. Marie habite en Normandie et répugne à conduire une fois de plus dans Paris parce que : « C’est pire que dans la jungle, et les animaux y sont plus cruels. »

-   «  Mais, Madame, nous habitons Paris, et il nous est difficile de nous déplacer jusqu’en Normandie. C’est que… moi non plus je n’aime pas trop conduire… »

Jeannot bondit de son siège et hurle à son oreille, «  Demandes lui où elle est en Normandie. » Marie qui a entendu, répond qu’elle habite près d’Evreux. Borg transmet la réponse à Jeannot qui lui hurle de nouveau :

-   « Dis-lui qu’on vient demain ! » Borg se retourne et lui dit :

-   «  Mais pourquoi cries-tu ainsi, je ne suis pas sourd ! »

-   «  C’est que, dès fois, on entend mal quand on est au téléphone. »

Marie qui entend tout, est étouffée de rire, c’est bien eux, et c’est fou ! Puis elle convient avec Borg de l’heure à laquelle ils viendront chez elle, et explique le chemin pour y parvenir.

Borg raccroche et s’assoit en face de Jeannot qui a toujours un air mécontent.

-   «  Enfin, Jeannot, qu’est-ce qui ne va pas ? Tu as l’air furieux. »

-   «  Tu n’as pas entendu ce qu’elle m’a dit ! Elle m’a dit que si elle avait fait des erreurs sur moi et pas sur toi, c’était parce qu’elle était plus proche de toi, c’est sympa, non ? »

-   «  Elle voulait certainement dire : plus proche sur le plan psychique. Qu’as-tu compris ? »

-   «  Moi je croyais qu’elle parlait en âge. »

-   «  Mais c’est vrai aussi, si elle a la quarantaine comme on le pense, elle est plus proche de moi que de toi. »

-   «  Ah ça, c’est pas prouvé. »

Borg éclate de rire et rétorque :

-   «  J’ai trente-quatre ans, mon copain, et jusqu’à quarante, il reste six ans, je te laisse compter le résultat jusqu’à soixante-deux. Mais serais-tu jaloux par hasard ? »

-   «  Trente-quatre ans ! Et moi qui croyais que tu en avais une bonne vingtaine ! »

-       « Je m’en suis aperçu plusieurs fois, mais réfléchit : Je suis médecin depuis plusieurs années, et tu t’es bien renseigné, il me semble sur les études de médecine, Alors ? »

-       « Tu as raison, je n’avais pas réalisé que le petit gars que j’ai ramené de la montagne, était devenu un homme, je ne vais plus oser te bichonner maintenant. »

-       «  Alors là, tu as tort, j’ai adoré cela, je n’ai pas été tellement bichonné dans ma vie et tu peux continuer sans problème. »

-   «  Eh bien tant mieux, parce que moi aussi ça me plait. Mais pour ta réflexion sur la jalousie, ne te fais pas de mouron, il n’y aura jamais d’histoire de femme entre nous, parce que je te laisserai toujours la priorité. Et si cette Marie te plait, je te la laisse. »

Un rire homérique est coincé dans l’estomac de Borg, mais il le refoule très fermement.

-   «  C’est très gentil de ta part. » Répond-il sérieusement.

-   «  Ah ? C’est donc que tu as des vues sur elle ? »

Le rire ne peut plus se contenir. Il s’exprime enfin. Et Borg dit en hoquetant:

-   «  Je te fais… marcher… je n’ai aucune vue sur… personne ! »

C’est ainsi que Borg sut que Jeannot avait « craqué » pour Marie Valente.

          Le lendemain, au petit déjeuner, Jeannot demande :

-   «  On fait comment pour aller là-bas, on prend le train ? »

-   «  Non, ce serait trop compliqué, on va y aller en voiture. »

-   «  Ah ? Tu as une bagnole ?

-   «  Oui. »

-   «  Alors tu peux m’expliquer pourquoi on se trimbale en taxi depuis plus d’une semaine ? »

-   «  Je n’aime pas conduire, surtout dans Paris. »

-   «  Et c’est quoi ta bagnole ? »

-   «  Une… un tout-terrain. »

-   «  Pourquoi ? Elles sont mal pavées les rues de Paris ? »

-   «  Non, bien sûr, mais… Ce sont les seules voitures que j’apprécie. Tu comprends, dans ma famille, ils ont tous des Mercedes ou ce genre de trucs, ma femme avait une Porsche, j’ai voulu avoir quelque chose de différent et surtout de plus discret. »

-   «  Si tu n’aimes pas conduire mon gars, tu peux me laisser le gouvernail, moi ce genre de bagnole, je sais exactement comment leur parler. »

Publicité
Publicité
Commentaires
LA RIVIERE GLACEE
Publicité
Albums Photos
Derniers commentaires
Publicité